L’ORIGINE DU NOM
Alors, d’où viennent les Losay (Les Argentin et les autres ) ?
D’abord, les patronymes se répandent et se raréfient : ils ont une vie propre.
La transmission du nom par les hommes est la « norme » française jusqu’à l’adoption par l’Assemblée Nationale le 8 février 2001 d’une proposition de loi permettant aux parents de donner à leur enfants le nom du père, de la mère ou les deux accolés.
En allant vers une telle pratique « à l’espagnole », la survie de certains patronymes sera peut-être mieux protégée. Nous avons un exemple très proche de risque d’extinction :
Armand Losay et Hélène Argentin ont eu trois fils, René, Georges et André, tous porteurs du patronyme Losay.
René a une fille, Françoise, et un garçon, Jacques. Plus qu’un porteur ! Jacques n’a que des filles? plus de porteur !
Georges a deux filles, Monique et Nicole.
1914 : André Losay (frère d’Armand) et sa femme au volant, avec ses neveux René (à l’arrière) et
Georges (marchepied). Cet André est un des fils d’Eugène Losay et Hélène Ouin (sosa n° 8 et 9)
André a deux garçons, Patrick et Dominique, mais Patrick a trois filles? Dominique a un garçon, Adrien qui seul perpétue le patronyme, sauf si les filles de Jacques ou de Patrick décident d’avoir des enfants qui portent le nom de Losay.
On voit que sur trois générations, un patronyme peut être menacé, alors qu’il est très ancien dans une région donnée. A l’inverse, des familles « prolifiques » et riches en garçons peuvent très vite donner l’impression artificielle d’une « souche ». La diffusion actuelle d’un nom et son implantation géographique ne sont que des éléments indicateurs et non révélateurs.
C’est pour cela que, dans le contexte historique vu précédemment, rien n’empêche de penser que les Losay, comme d’autres familles soient venues d’ailleurs et – pourquoi pas ? – de Haute-Savoie où nous avons trouvé des Lozet ou de Suisse où les Losey abondent et sont avérés depuis le début du XV° siècle dans le canton de Fribourg.
Par ailleurs, l’orthographe des patronymes ne s’est stabilisée que très, très récemment. De manière générale dans la deuxième partie du XIX° siècle. Ne cherchons donc pas à diviser les Losay, Losey, Lozé, Lozai et autres Lauzet en autant de « branches » différentes.
On trouvera ainsi, par exemple, qu’un Losey suisse, petit notable de village, change lui-même d’emploi d’orthographe de son propre nom dans les années 1840.
L’orthographe est plutôt fonction des habitudes du scripteur, prêtre ou notaire le plus souvent. Ainsi, on trouvera dans les années 1680-1700 le curé de Drosay qui écrira Losay et celui de Crasville la Mallet qui écrira Lozé. A Longueil, on trouve fréquemment des orthographes différentes de Lozay jusque dans le même acte.
Eugène Losay (sosa n°8) |
et sa femme Hélène Ouin (sosa n°9) |
Pour ce qui concerne les patronymes « parlant » (descriptif d’un état ou d’une activité), la variation la plus usuelle est l’emploi ou non d’un article défini. Mais ceci peut exister pour les noms moins communs. Nous avons tous entendu cela dans nos campagnes : On n’est pas Norbert, mais « le » Norbert. Evidemment, les Tellier sont aussi Le Tellier, les Vilain Le Villain, Argentin L’Argentin.
Le nom de « famille », fait partie d’un tout, avec le prénom, pour distinguer les individus et en même temps les attribuer à un groupe. C’est François 1er qui fixe en France les débuts de l’Etat Civil, avec l’ordonnance de Villers-Cotterêts le 10 août 1539.
Cependant, les noms de familles se sont déjà stabilisés bien antérieurement. Comme si souvent, la loi entérine une situation « sociétale » existante et ne prétend pas transformer les modes de vie ou les habitudes. Pour les familles patriciennes, on trouve des noms propres dès le XI° siècle : un Giffard, par exemple, est un compagnon de Guillaume le Conquérant auquel se rattache, au moins par alliances, de nombreuses familles ainsi nommées dans la région de Dieppe. Avant d’être « sur scie », Longueville était « Longueville la Giffard ». Pour les familles plus modestes, en tout cas, on trouve couramment un patronyme stabilisé dans la première partie du XV° siècle.
L’origine du nom (onomastique) n’en est pas moins une discipline délicate. Parfois les noms ont une origine clairement lisible : nom de lieu, descriptif, origine étrangère? parfois moins !
Les Anquetil, Turquetil, et autres Coquatrix sont ainsi clairement des noms d’origine nordique. On comprend également bien ce que peuvent être les Dubosc, Dubuc ( du bois) ou les Tellier (toiliers). Mais nos ancêtres pouvaient avoir l’esprit ironique. C’était même semble-t-il très répandu. Ainsi, ne cherchons pas un roi derrière un Leroy. Au mieux, il était « le roi » d’ un concours de quilles ou de tir à l’arc, au pire, il y était exécrable. Un Leclerc pouvait bien sûr être le lettré (le clerc) mais tout aussi bien l’idiot du village?
A la question que j’avais posée dans Gé-magazine sur l’origine du nom Argentin, voici ce que répondait Françoise Etievant : « Quant à cet Argentin, ce marin de Fécamp, a-t-il une fois navigué jusqu’en Argentine ? ou en rêvait il au point de s’attirer ce surnom ? Peut-être venait il plus simplement d’Argentan ou d’Argenton ou même d’Argenteuil ou de l’un de ces sites au nom basé sur le vieux gaulois arganto et où l’on exploitait de toute antiquité quelque filon précieux de ce fameux métal de lune ?
Mais peut-être n’a-t-il pas eu besoin de tous ces voyages pour acquérir son nom : il lui a sans doute suffi d’un son de voix particulièrement pur et clair? ».
Adèle Philippe et son mari Georges Argentin, tous les 2 au centre (n° sosa 10 et 11)
Pour Losay, on est plus hésitant. Il existe un certain nombre de villages ou de hameaux du nom (phonétique) de Losay. On en trouve en Charente Maritime, dans l’Orne, en Savoie? Pierre-Henri Billy dans « origine des noms de villes et des villages de France » (Ed. Famot, Genève – 1981) donne aux villages de Lozay (17), de Loisail (61) et de Louzignac une origine commune d’origine latine, « domaine de Lausius ou de Losenna ».
C’est aussi le point de vue de Mme Grave-Bourg, spécialiste d’onomastique, qui, dans un courrier de 1983, faisait de « Losay : un dérivé du nom de personne latin et bas-latin Lausius ou Lautius. A l’origine il devait s’agir d’un toponyme (nom de lieu), Lausiacus. Qui représentait l’ancien domaine d’un Romain du nom de Lausius ou dérivé. Par extension, en tant que nom de famille, Losay désignera l’homme habitant ce lieu ou en étant originaire? »
Le manoir de Vittefleur. 4 générations de Losay ont vécu dans le bourg de Vittefleur, mais pas au manoir !! Eugène (sosa n° 8) qui y est né en 1859, son père, Eugène (sosa 16) qui y est né en 1826, le père de son père, Louis Adrien (sosa n° 32) qui y est mort en 1860. Le père de celui-ci, Adrien Charles Losay y est mort en 1821.
Ainsi, dans la rubrique « Gens d’ici et d’ailleurs » d’un journal suisse, la Tribune de Lausanne, (18.06.1989), Charles Montandon fait de « Losey une forme patoise de l’osier, rappelant une plantation de saules ou un producteur d’osiers pour la vannerie. Lozet fait aussi penser à l’oiseau (vieux français Osel), comme Loiseau, Loisel, Oselet (oiselet), Maloiseau (mauvais oiseau) » On peut penser également au « loos » flamand qui désigne un cours d’eau. On découvrira également plus loin le mot wallon « losè » qui désigne une bêche.
Pour l’heure, nous en resterons à nos ancêtres du coeur du pays de Caux au milieu du XVII° siècle. On ne peut désespérer de trouver de nouvelles sources pour remonter à des origines plus lointaines? avec un oeil attentif sur ces Losey suisses peut être venus jusqu’au côtes normandes avec le service mercenaire? ? ? en attendant de trouver ce fameux Lausius !
Le patronyme L’Orphelin donne l’apparence d’une originaire claire : il serait ce qu’on appelle un patronyme « parlant », c’est à dire explicite d’une situation (comme Dubois, par exemple).
On aurait ainsi la descendance de quelqu’un qui, au moment de la formation des noms de famille, au XIV° siècle sans doute, aurait été appelé ainsi pour désigner sa situation familiale.
Ce qui surprend dans le patronyme L’Orphelin, c’est sa relative rareté sur l’ensemble du territoire. Il est, bien sûr, extrêmement présent dans la région dieppoise, mais ceci est à mettre au crédit du nombre important d’enfants portant ce nom dans la région depuis la fin du XIX° siècle. Cependant, s’il s’était agi de désigner des orphelins, qui ne manquaient pas au Moyen- Age, on devrait s’attendre à voir dans Lorphelin un nom de famille très répandu dans tout le pays. Or il n’en est rien. On peut même dire qu `il y a une relative concentration en Normandie, si on ajoute à la branche cauchoise, la famille Lorphelin de notables de la région d’Alençon (généalogie du Docteur Didier Lorphelin, de Paris).
Une autre piste serait de tourner le dos au caractère « parlant » du nom. On peut alors essayer de rattacher le patronyme Lorphelin au vieux nom germain latinisé en Ulfinus qui a essaimé tantôt sous la forme de Vulfin ou sous celle d’Orfin (Orphin). Il existe d’ailleurs un village du nom d’Orphin dans les Yvelines.